De l’intelligence collective à l’intelligence artificielle. Du modèle distribué au modèle centralisé du savoir

Alessandro Zinna (UPR PROJEKT Nîmes et CAMS/O Université de Toulouse 2 – Jean Jaurès)

Conférence au  Séminaire International de Sémiotique à Paris « Énonciation(s) et passions dans les territoires sémiotiques ouverts par l’Intelligence Artificielle », mercredi 19 juin, de 13h45 à 17h00, à la Maison Suger (Paris 6e) et en distanciel (http://bit.ly/3QE2dSp).
Résumé
De l’intelligence collective à l’intelligence artificielle. Du modèle distribué au modèle centralisé du savoir 
À plusieurs reprises, au début des années 1990, Pierre Lévy avait donné des définitions plutôt saisissantes de l’intelligence collective : il s’agissait de ces réseaux d’intelligences individuelles qui, une fois connectées entre elles, deviennent la réalisation la plus proche de la Noosphère, un concept introduit par Vl. Vernadsky déjà dans les années 1920. La Noosphère est cette pellicule neuronale qui relie les intelligences individuelles, par définition idiosyncrasiques, dans un réseau visant à valoriser les singularités émergentes. Or, l’intelligence collective de P. Lévy était pensée sur la base du développement des réseaux hypertextuels. Une trentaine d’années plus tard, l’évolution vers le modèle de l’IA pourrait supplanter le modèle à réseau pour nous introduire dans une autre distribution des rôles où l’IA devient le grand collecteur d’un savoir moyen écrasant les singularités des intelligences humaines pour parvenir à produire les premières singularités de l’IA générative. Le premier et le plus radical changement de rôles concerne donc le passage d’une intelligence distribuée à une intelligence centralisée. Nous aborderons la problématique de l’IA et de son énonciation – à savoir la simulation conversationnelle de l’échange linguistique et/ou multimodale –, à partir de la constatation qu’il s’agit d’une interface d’accès et d’élaboration des données et, en tant que telle, nous situerons ce phénomène dans une archéologie des interfaces. On pourrait résumer cette position et une telle méthode en paraphrasant le titre du livre de M. Foucault comme le passage et la relation d’une archéologie du savoir à une archéologie des interfaces.